Il paraît qu’on n’oublie jamais ses premières fois. Il est donc sûr que pour Juliette Armanet et ses fans, cet adage se vérifie. Le 17 mars dernier, elle frôlait pour la première fois de sa carrière, à tout juste deux albums studio, la scène de l’Accor Arena de Paris.
Dans une ambiance survoltée, dès les premières minutes, en tenue noire pailletée, Juliette rentre sur scène comme on rentre sur un ring de boxe, avec l’envie de mettre K.O son adversaire. Elle enchaîne ce qui sont déjà des succès Boom Boom Baby, L’épine, Qu’importe. Alternant moments au micro ou avec son piano, comme pour le premier moment intime du concert avec La carte postale, Juliette Armanet ne cesse de remercier chaleureusement son public d’être là ce soir à Bercy (tant pis pour le nouveau nom de la salle, Bercy reste Bercy), en montrant qu’elle a encore dû mal à croire qu’elle chante dans cette salle si mythique ce soir. Elle emporte son public, lui transmet émotions et plaisirs de vivre, chante son dernier tube Flamme avant de s’offrir un bain de foule en traversant la fosse (debout et pleine à craquer) sur J’te l’donne pour rejoindre une petite scène centrale et un piano tout blanc.
Durant ce petit bain de foule, on pourra lui reprocher les bisous sur la bouche volés à certains fans qu’elle aura enlacés auparavant. À une époque où le « Me too » bat son plein, avec du féminisme limite extrémiste, peut-être que si elle avait été un homme, elle n’aurait pas agi ainsi. Cela est le seul bémol de la soirée et très vite sa voix délicate et somptueuse ravit à nouveau son public. Elle s’accompagne seule au piano pour son divin Imaginer l’amour, la « chanson chaude » de la soirée dira-t-elle après s’être désaltérée dans le verre de bière d’un fan. Michel et Vertigo suivent, la scène principale est rejointe dans un bain de foule plus rapide et Juliette nous offre l’une de ses plus belles chansons avec L’amour en solitaire, du premier album.
Une sortie de scène pour se changer, Juliette revient avec son manteau brillant de mille feux pour un Dernier jour du disco stratosphérique où le public est à nouveau debout. Elle s’amuse avec lui en lui faisant reprendre le dernier refrain puis enchaîne encore et toujours d’autres succès avec A la folie, Brûler le feu et Tu me play. Si les rollers n’étaient pas là sur la dernière chanson, le feu a bien brulé avec beaucoup de fumée sur la chanson précédente. Dans une ambiance électrique, dont on a du mal à redescendre, elle quitte la scène.
Le feu ayant donc trop brulé, au moment où Juliette revient à son public pour les deux dernières chansons « d’un premier Bercy inoubliable », l’alarme incendie retentit. Dubitatifs, le public et elle se demandent ce qui se passe. On lui demande de sortir de scène. Le public est invité à quitter la salle. Peu à peu la salle se vide donc avec une impression de soirée plus qu’inachevée. Alors que certains ont déjà regagné la sortie, le public est averti que le problème est résolu et que le concert peut reprendre. Pour ceux qui n’avaient pas encore quitté la salle, Juliette avait fredonné avec eux Le dernier jour du disco en s’offrant un slam avec les premiers rangs. C’est donc avec bonheur (« que le public soit revenu ») qu’elle s’installe au piano pour Sauver ma vie et un délicat Le rouge aux joues qu’elle reprendra, s’étant trompée, subjuguée par l’émotion d’avoir fini son premier Bercy.
Le concert est fini pour de bon, le public sort de la salle avec des étoiles plein les yeux, des papillons dans le ventre. Il en est sûrement de même pour Juliette Armanet qui a prouvé, s’il fallait encore qu’elle le fasse, qu’avec ,à peine deux albums studio, elle fait déjà partie des grands auteurs-compositeurs-interprètes français qui savent soulever les foules autant par leur voix que leur piano. Il est aussi certain que ce premier Bercy n’est sûrement pas le dernier.